Fouilles archéologiques

TANCARVILLE (76) – route de Saint-Romain

Les fouilles menées à Tancarville « Route de Saint-Romain » (76) ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité de Samuel Lelarge et de Justine Lyautey. Elles interviennent dans le cadre du projet d’aménagement d’une zone pavillonnaire à l’initiative de la société Logeo Seine. La prescription archéologique avait été motivée par la découverte d’une nécropole mérovingienne à l’occasion d’un diagnostic conduit en 2020. À cette problématique initiale de recherche, les fouilles ont permis d’ajouter les découvertes des vestiges fossoyés d’un probable monument funéraire rattachable, de part son aspect, à la Protohistoire ancienne et un tronçon de fossé probablement relatif à un enclos d’habitat sensiblement plus récent.

La prescription d’une nécropole

Le cahier des charges scientifique (CCS) qui définit les objectifs de l’opération comprend plusieurs axes de recherches dont les habituelles problématiques d’étendue de la nécropole, du nombre de sépultures, de la topo-chronologie des tombes, de la typo-chronologie des objets ou encore les conventionnelles analyses archéo-thanatologies. Il accorde surtout une grande place à l’étude des matériaux organiques.

La nécropole, entièrement dégagée, s’étend sur une superficie de 550 m². Elle occupe la partie haute d’un versant du plateau du Pays-de-Caux qui domine l’estuaire de la Seine. Le choix du lieu d’implantation de l’espace funéraire, sa forme et son étendue sont manifestement conditionnées par plusieurs contraintes topographiques (ruptures de pentes d’ampleur variable) et par la proximité immédiate d’un probable monument tumulaire de l’Âge du Bronze ancien ou moyen (datation à confirmer).

L’organisation de la nécropole

91 tombes ont été mises au jour et il se peut que certaines ne nous soient pas parvenues en raison de la forte érosion des sols. Dans le tiers nord-est de l’espace funéraire, une organisation en rangées plus ou moins régulières suivant un axe nord-ouest / sud-est se dessine. Quelques singularités dans cette distribution sont à relever, tels l’existence d’espaces vides de la taille d’une sépulture, la présence de plusieurs concentrations de tombes formant en quelque sorte des noyaux et, surtout, un nombre important d’inhumations volontairement accolées ou dîtes « doubles ». Un même constat peut être dressé pour le tiers sud-ouest de la nécropole, zone où l’orientation des fosses tend  à se démarquer des précédentes en suivant un axe nord nord-ouest / sud sud-est. L’occupation de la partie centrale de la nécropole est bien différente, alternant entre espacesmanifestement vides de structure, regroupements de plusieurs tombes et quelques sépultures étonnamment orientées nord-est / sud-ouest.

Les fosses sépulcrales sont de forme quadrangulaire ou oblongue. Les individus sont placés dans des contenants en bois du type cercueil ou coffrage fermé par un couvercle (observations stratigraphiques, effets de paroi). L’usage de quincaillerie métallique dans l’assemblage de ces contenants n’est pas, à ce stade des recherches, formellement attesté. De probables clous figurent bien à l’inventaire – provisoire – du mobilier de plusieurs tombes, cependant, il convient d’attendre le dégagement des gangues sédimentaires dans lesquelles ils ont été prélevés afin d’en confirmer l’existence et leur fonction. Relevons aussi la quasi absence d’éléments de calage ou de coffrage en pierre qui prédominent pourtant non loin, à Harfleur.  Remarquons également que malgré des dispositions géographiques favorables (commerce par la vallée de la Seine), ni sarcophage en pierre calcaire, ni contenant en plâtre figurent parmi les découvertes.

La population inhumée

En ce qui concerne la disposition des corps, ne pouvant s’appuyer sur les restes osseux qui s’illustrent par leur absence, seule la distribution du mobilier nous informe sur le sujet. Ainsi, une majorité des inhumations est manifestement réalisée tête plus ou moins orientée vers l’ouest. Par ailleurs, la disparition des matières osseuses n’offre aucune perspective quant à la caractérisation du recrutement populationnel.

Le mobilier funéraire

Tenant compte de l’état d’avancement de nos travaux, la question du mobilier funéraire ne peut être qu’effleurée. En effet, l’étude des matériaux organiques suit un protocole spécifique qui interdit le détourage des objets sur le terrain et impose la systématisation du prélèvement du matériel dans un écrin sédimentaire. Par conséquent, la nature de nombreux objets nous échappe encore, tout comme leur nombre exact. Toutefois, la forme des prélèvements, leur emplacement dans la tombe et les inexorables contacts avec le mobilier lors de la fouille nous informent de la présence d’armes, d’éléments vestimentaires et de parures. Toute réflexion d’ordre socio-économique est prématurée, néanmoins, il convient de signaler dès à présent la présence d’assemblages complexes dans plusieurs tombes et, surtout, de remarquer la fréquence des dépôts ( ≈ 97 % des tombes concernées).

Les études du mobilier ainsi que des données récoltées se poursuivent actuellement.

Article rédigé par le bureau d’étude archéologique Eveha

Dépôt de céramique Mérovingienne
Plan d’une tombe double